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Comment contester la procédure d’attribution d’une convention d’occupation du domaine public ?

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Comment contester la procédure d’attribution d’une convention d’occupation du domaine public ?

Comment contester la procédure d’attribution d’une convention d’occupation du domaine public ? Voilà une question pertinente d’autant plus avec l’entrée en vigueur de l’article L. 2122-1-1 du code général de la propriété des personnes  publiques. Cette disposition impose l’attribution au respect d’une procédure de sélection préalable présentant toutes les garanties d’impartialité et de transparence, et comportant des mesures de publicité permettant aux candidats potentiels de se manifester.

L’exploitation économique du domaine public appelle donc désormais l’organisation d’une procédure de mise en concurrence. Il est donc légitime de s’interroger sur les voies de recours permettant de garantir le respect des principes d’impartialité, de transparence et de publicité.

Tant le candidat dont l’offre a été rejetée que le candidat potentiel, qui n’a pas été en mesure de déposer une offre en raison de l’absence ou l’insuffisance des mesures de publicité de la procédure de sélection préalable, doivent pouvoir faire valoir leurs droits devant le juge.

L’incontestable compétence de la juridiction administrative pour contester la procédure d’attribution d’une convention d’occupation du domaine public

La compétence de la juridiction administrative ne fait aucun doute.

L’article L. 2321-1 du code général de la propriété des personnes publiques consacre la compétence exclusive du juge administratif. Cette compétence porte, notamment, sur les litiges relatifs aux autorisations ou contrats comportant occupation du domaine public, quelle que soit leur forme ou leur dénomination, accordées ou conclus par les personnes publiques ou leurs concessionnaires.

La compétence du juge administratif est, donc, consacrée par le législateur.

Le contentieux de la procédure d’attribution d’une convention d’occupation du domaine public relève de la compétente exclusive du juge administratif.

L’exclusion du référé précontractuel pour contester la procédure d’attribution d’une convention d’occupation du domaine public

Bien évidemment, pour ce contentieux, le premier réflexe est de penser à la procédure du référé précontractuel, qui a su faire efficacement ses preuves en matière de contrat de la commande publique.

Pour autant, de jurisprudence constante, il est jugé que les conventions d’occupation du domaine public n’entrent pas dans le champ des articles L. 551-1 et suivants du Code de justice administrative :

« Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le contrat litigieux, pour lequel la société Extérion Média a demandé au juge du référé précontractuel l’annulation de la procédure de passation, revêt le caractère d’une convention d’occupation du domaine public ; qu’un tel contrat, qui n’a pour objet ni la délégation d’un service public ni l’exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d’exploitation, n’est pas au nombre des contrats mentionnés à l’article L. 551-1 du code de justice administrative, à l’égard desquels le juge du référé précontractuel peut prendre les mesures définies à l’article L. 551-2 de ce code ; que, par suite, et alors même que l’établissement public Tisséo a choisi de se soumettre, sans y être tenu, à la procédure applicable aux marchés publics passés par des entités adjudicatrices, lesquels relèveraient au demeurant de l’article L. 551-5, le juge du référé précontractuel n’était pas compétent pour statuer sur la demande présentée par la société Exterion Média » . 

(CE, 3 décembre 2014, n° 384170).

La Conseil d’État a pu implicitement rappeler ce principe d’exclusion, et cela en dépit de l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions de l’article L. 2122-1-1 du code général de la propriété des personnes publiques :

« Considérant que si les dispositions de l’article R. 5312-84 du code des transports cité au point 4 prévoient notamment que  » les conventions de terminal sont conclues à l’issue d’une procédure ouverte, transparente et non discriminatoire « , cette circonstance n’est pas, en elle-même, de nature à faire entrer les conventions de terminal dans le champ d’application de l’article L. 551-1 du code de justice administrative ; que saisi d’une telle convention sur le fondement des dispositions de l’article L. 551-13 du code de justice administrative, il appartient au juge du référé contractuel de rechercher si cette convention, compte tenu de son objet et des contreparties prévues, peut être qualifiée, ainsi que le prévoit l’article L. 551-1 du même code, de  » contrat administratif ayant pour objet l’exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d’exploitation, la délégation d’un service public ou la sélection d’un actionnaire opérateur économique d’une société d’économie mixte à opération unique  » ; 

7. Considérant qu’il ressort des énonciations de l’ordonnance attaquée que le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux s’est fondé sur la seule circonstance qu’une  » procédure ouverte, transparente et non discriminatoire  » était prévue à l’article R. 5312-84 du code des transports préalablement à l’attribution des conventions de terminal pour estimer que la  » convention de mise en régie  » conclue le 21 septembre 2016 entre le GPMB et la SMPA entrait dans le champ d’application matériel de l’article L. 551-1 du code de justice administrative ; qu’il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a, ce faisant, commis une erreur de droit ; que par suite, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens des pourvois, la SMPA et le GPMB sont fondés à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée ; ». 

(CE, 14 février 2017, n° 405157).

Autrement dit, le référé précontractuel de l’article L. 551-1 Code de justice administrative concerne uniquement les contrats ayant « pour objet de satisfaire un besoin de la personne publique au moyen d’une prestation dont elle bénéfice en contrepartie du paiement d’un prix ou de l’octroi d’un droit d’exploitation » (Conclusions Gilles Pellissier sous CE, 14 février 2017,n°405157).

En l’occurrence, tant que la concession domaniale n’est pas rattachée à un contrat de la commande publique (article L2 du code de la commande publique), la procédure de référé précontractuel ne s’applique pas.

Dès lors, quelle procédure pour garantir les droits du candidat évincé ?

Le recours aux procédures de droit commun pour contester la procédure d’attribution d’une convention d’occupation du domaine public

L’ouverture du recours en contestation de validité du contrat 

De jurisprudence  constante, il  était admis, avant l’entrée en vigueur des dispositions de l’article L. 2321-1 du code général de la propriété des personnes publiques, que dans le cas où la personne publique propriétaire de la dépendance du domaine public décidait de soumettre l’attribution de la convention portant autorisation d’occupation à une procédure de sélection, le recours en contestation de validité du contrat (recours Tarn et Garonne) pouvait être introduit.

Autrement dit, tout tiers à une convention d’occupation du domaine public, susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses, est recevable à introduire un recours en contestation de la validité de la convention devant le juge du contrat (CE 2 décembre 2015, École centrale de Lyon, req.n°386979 ou encore CAA Paris, 11 octobre 2017, n° 16PA02885).

Cette solution jurisprudentielle est toujours d’actualité.

Dans une réponse ministérielle, publiée au journal officiel du Sénat du 1er juillet 2021 (page 4079), le gouvernement indique :

« Dans le cas d’une convention d’occupation temporaire (COT), le juge du contrat peut être saisi par un candidat évincé ou un tiers justifiant d’un intérêt lésé par ce contrat. Le juge aura la possibilité, selon l’importance et les conséquences des vices éventuels du contrat, soit de décider la poursuite du contrat, soit d’inviter les parties à prendre des mesures de régularisation soit, si les irrégularités ne peuvent être couvertes par des mesures de régularisation et ne permettent pas la poursuite de l’exécution du contrat, de prononcer la résiliation de la COT, après avoir vérifié que sa décision ne porte pas une atteinte excessive à l’intérêt général. Enfin, si le contrat a un contenu illicite ou s’il se trouve affecté d’une irrégularité particulièrement grave, comme un vice de consentement ou de toute autre vice d’une telle gravité que le juge doit ainsi relever d’office, l’annulation totale ou partielle de celui-ci pourra être prononcée (CE, 4 avril 2014, « Département du Tarn-et-Garonne », n° 358994) ».

(Réponse du Ministère auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance – Comptes publics publiée dans le JO Sénat du 01/07/2021 – page 4079).

Par conséquent, le recours en contestation de validité est ouvert contre les conventions d’occupation du domaine public, sous réserve de remplir les conditions de recevabilité, à savoir, en tant que requérant, disposer d’un intérêt lésé par la conclusion de la concession domaniale.

La Cour administrative d’appel de Paris vient de le confirmer, jugeant :

« Tout tiers à une convention d’occupation du domaine public, susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses, est recevable à former, devant le juge du contrat, un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles« .

(CAA Paris, 17 mars 2022, n° 20PA00588).

L’utilité de ce recours réside évidemment dans les importants pouvoirs dont dispose le juge du contrat, point sur lequel nous vous renvoyons vers notre article dédié (Les pouvoirs du juge dans le cadre d’un recours en contestation de la validité du contrat).

Malheureusement, en pratique, une telle procédure judiciaire peut s’avérer inadaptée car ce recours n’est pas compatible avec la potentielle urgence économique du candidat évincé.

La possibilité de coupler le recours en contestation de validité de la convention d’occupation du domaine public avec un référé suspension

Le référé suspension de l’article L. 521-1 du code de la justice administrative permet, dans un bref délai, d’obtenir la suspension de la décision administrative.

Les conditions de recevabilité du référé suspension sont :

– l’urgence ;

– le doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

– l’introduction d’un recours devant le juge du fond compétent.

Le juge administratif admet qu’un recours en contestation de validité d’un contrat soit couplé avec un référé suspension (CE, 19 janvier 2015, société Ribière, n° 385634).

Notre conseil pratique pour défendre les droits et intérêts du candidat évincé de la procédure d’attribution d’une convention d’occupation du domaine public est de saisir le juge du contrat et d’assortir ce recours au fond d’un référé suspension.

Si le contentieux des conventions d’occupation du domaine public se normalise en ce qu’il se rapproche du contentieux des contrats de la commande publique, sa technicité nécessite, pour augmenter les chances de succès d’une action contentieuse, de se rapprocher d’un avocat expert en la matière.Notre équipe est évidemment à votre disposition pour vous accompagner et vous guider.

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